C’est l’exception française qui part en fumée !

Zou, je voulais rebondir sur un commentaire intéressant de So Long.

So Long a écrit:

ce qui me déplait dans tout ce tapage autour du tabac ce n'est pas le caractère liberticide, mais la stigmatisation qu'elle implique. Je ne sais pas si tu as vu l'excellent documentaire "Over size me" sur les méfaits de la malbouffe, mais un des spécialistes interrogés tenait un raisonnement qui m'a beaucoup plus. "Quand on est dans un restaurant, dans la rue, les non-fumeurs bien pensants nous arrêtent pour nous dire qu'on se tue à petit feu, qu'on fait du mal à ceux qui nous entourent, qu'on est des pourris. Et si moi j'allais voir une femme ou un homme obèse, assis dans un McDo en train de se goinfrer pour lui dire qu'il se tue à petit feu, qu'il est une gène pour les autres et que ses intestins sont pourris ? On hurlera au scandale." Car le problème vient de là, plus que d'une atteinte à la liberté... pas dans un exception à la française ou à la quelquechose, mais de ce qu'on montre du doigt l'arbre qui cache la forêt. Et ça, ça me sidère.
De même que d'autres non fumeurs bien pensants ont fait circuler une pétition dans leur immeuble pour interdire aux fumeurs d'y habiter ou d'y fumer parce que la fumée passe sous la porte d'entrée et vient géner leur narines délicates dans le couloir. (authentique, et je ne parle pas des parties communes on est bien d'accord) De même que dans l'immeuble de ma grand-mère, une dame est allé se plaindre au syndic parce que le couple de Sri Lankais qui vit en dessous de chez elle fait de la cuisine qui pue et que ça la gène. Et je peux continuer comme ça très longtemps. Et c'est davantage ça qui me gène. Je pense être une personne tolérante, mais si moi je tolère le mec qui pue dans le métro, le pochtron qui se pisse dessus dans la rue, la connasse qui met trois tonnes de parfum bon marché, et la pétasse qui hurle dans son téléphone dans le train/bus... alors qu'on tolère que moi, droguée personne malade qui va mourrir de son addiction, je puisse demander le droit de fumer, au moins chez moi et dans la rue, si ce n'est dans un bar ou un pub.

Je vais enfoncer des portes ouvertes, mais tu mets le doit sur quelque chose d'assez flippant : la perte de la capacité à vivre ensemble et à supporter les différences qui peuvent nous agacer. L'espace public, où on est forcé de se confronter et de se frotter aux autres qui ont des comportements, des goûts et des habitudes différents des nôtres, de se supporter même lorsqu'on s'agace mutuellement (la vieille qui marche à deux à l'heure, le branleur qui écoute la musique à fond sur son portable, le yuppie qui parle fort dans son portable, etc), j'ai l'impression qu'il est en train de se transformer en juxtaposition de mini-bulles privées grâce à des ustensiles (baladeurs, portables, consoles...) qui nous permettent d'éviter au maximum toute interaction, tout regard. Et oui, je fais des phrases longues et imbitables si ça me plaît, non mais oh.

Mais en même temps, j'ai l'impression que les gens sont demandeurs de cette vie publique qui se perd : hier dans le métro, un type faisait le zouave et racontait des conneries tout haut. Résultat : les gens se marraient, causaient. Et on pourrait en trouver des dizaines d'exemples comme ça où, une fois passé la croûte primaire de méfiance et de peur qui enrobe les gens, ceux-ci sont plus que contents de causer. On est là, en train de se dire comme des Mâme Michu : "Quand on voit ce qu'on voit et qu'on entend ce qu'on entend, on a bien raison de penser ce qu'on pense", les mains crochetées sur notre sac tel une Bernadette de bas étage, alors que la peur est pour une grande part irraisonnée, mais on se la fait instiller au goutte à goutte. Et on finit par voir l'autre comme une source de danger, ou d'emmerdements.

Est-ce qu'on sait encore vraiment vivre ensemble, en fait ?

C'est toujours le délire de la liberté des uns s'arrête là où commence celle des autres. Phrase qui me gonfle un peu tant on la sort tout le temps à tort et à travers.

Qu'on interdise au gens de fumer dans des lieux publics ET clos, ok. Mais après, qu'on vienne pas me faire ch*** dans la rue non plus. ET chez moi, bah, c'est chez moi, justement alors si je veux fumer, me balader à poil ou cuisiner tous les soirs une tartiflette au reblochon ou du choux, c'est mon droit. C'est pas précisé dans mon bail.

Après, il faut évidemment que chacun y mette du sien pour une vie en société en bonne intelligence. Oui, techniquement, j'ai le droit d'écouter de la musique chez moi à 4h du mat et même que si je dépasse un certain niveau de décibels, on peut rien faire contre moi. Après tout, c'est pas ma faute si les murs sont en paier cigarette. Si mon comportement dérange mon voisin et qu'il me le fait remarquer gentiment, je ferai gaffe. On n'est pas toujours conscient qu'on dérange les autres.

Tout est question de limite et de respect de l'autre. Ce n'est pas parce qu'on est le camp des intolérés qu'on doit à son tour virer intolérant.

Bon, je vais revenir sur mon propre commentaire qu'il est de moi et seulement moi et myself et I....

Ceux et celles qui me connaissent auront certainement compris que j'en ai volontaire fait des tonnes ici, que je ne suis pas aussi extrémiste en réalité.

Par contre, je persiste à dire que cette manie de stigmatiser les gens pour leur choix me fatigue au plus haut point, et le problème c'est que ce genre de dérive est de plus en plus confortée par les gouvernements. Selon moi, cette loi outrepasse largement le champ de la volonté générale et du bien commun. Demander une REELLE application de la loi Evin aurait été bien plus juste. Car les mesures existaient déja, séparer fumeurs et non fumeurs c'est possible, mais se contenter d'une "zone" comme le faisaient les bars et restau n'était pas un application satisfaisante.
Ensuite, cette loi a également été votée pour protéger les salariés... vous en connaissez beaucoup, vous, des serveurs ou patrons de bar qui ne fument pas du tout ? Personnellement, j'en connais aucun. Mais bon... soit. Parler de protection du salarié, dans une profession qui de toute façon reste épuisante, physique et difficile... c'est un peu du fouttage de gueule.

Enfin, pour l'application actuelle de la loi. Hier pour la première fois depuis le premier janvier, j'ai fait mon trajet habituel jusqu'à chez ma grand mère... c'est à dire depuis Saint Germain jusqu'à Nation. Il était la même heure que d'habitude... et les bars qui sont pleins normalement étaient vides pour la plupart. Les seuls endroits à peu près fréquentés étaient ceux qui avaient une terrasse extérieure chauffée. On m'opposera probablement l'argument des soldes, mais au contraire, en période de soldes le quartier que je traverse fait le plein partout parce qu'il est bien agréable de prendre un verre après de bons achats. On m'opposera peut être aussi la baisse du pouvoir d'achat, mais c'est pas nouveau. En tout cas c'est la première fois que je vois le coin aussi mort alors que c'est plutôt vivant d'habitude.

Je n'ai pas encore mis les pieds Rue Mouffetard ni à Saint Michel, et je me demande si les symptomes sont les mêmes partout. Par contre, le café où tous les étudiants se retrouvent à côté de ma fac reste désespérément vide, alors qu'il était plein en permanence... tout le monde l'a déserté au profit d'un autre, un peu plus loin, un peu plus cher, mais avec terrasse.

Alors voilà, évidemment les français s'habitueront, mais en attendant qu'ils s'habituent, les patrons risquent d'avoir un peu mal au cul.


Enfin, pour répondre au fait qu'avant on avait le droit de fumer au bureau et que plus maintenant : il est très différent de fumer au travail, et fumer dans un moment de détente, donc je ne pense pas que les deux cas soient absolument comparables.

So Long, lis vite j'arrête de fumer de Cati Baur, tu vas adorer. Elle fait remarquer pas mal de trucs très vrais sur le fait de fumer et l'intolérance des non-fumeurs, faisant remarquer que les + intolérants sont les non fumeurs eux-mêmes. Elle fait une comparaison avec les gros, à un moment : c'st socialement inacceptable de fumer comme d'être obèse parce que ça renvoie toujours une image de mauvaise santé, quelque part. Mais comme elle dit, les gros ne sont bannis d'aucun endroit.

Le problème ne vient pas des fumeurs ou des non fumeurs mais effectivement qu'il n'y a pas de réelles salles fumeurs dans les restos, c'est juste un groupement de table. Mais les nuages de fumée, c'est comme les nuages nucléaires, ça respecte les frontières, hein...

Enfin, je n'ai pas vu la différence dans les bars, du moins dans le Marais.

SoLong a écrit:

Ensuite, cette loi a également été votée pour protéger les salariés... vous en connaissez beaucoup, vous, des serveurs ou patrons de bar qui ne fument pas du tout ? Personnellement, j'en connais aucun. Mais bon... soit. Parler de protection du salarié, dans une profession qui de toute façon reste épuisante, physique et difficile... c'est un peu du fouttage de gueule.

là t'es de mauvaise foi quand même: pour un barman, dans un bar enfumé la solution est de fumer pour que la fumée (des autres) soit plus supportable. Ensuite difficile d'arreter quand tu respire la fumée pendant tout ton temps de travail.
Du coup quelqu'un qui ne fume pas ou qui ne tolère pas la fumée était exclu de ces professions quelque part. Un peu discriminant.

PinkLady a écrit:

So Long, lis vite j'arrête de fumer de Cati Baur, tu vas adorer. Elle fait remarquer pas mal de trucs très vrais sur le fait de fumer et l'intolérance des non-fumeurs, faisant remarquer que les + intolérants sont les non fumeurs eux-mêmes. Elle fait une comparaison avec les gros, à un moment : c'st socialement inacceptable de fumer comme d'être obèse parce que ça renvoie toujours une image de mauvaise santé, quelque part. Mais comme elle dit, les gros ne sont bannis d'aucun endroit.

Ben oui, c'est tout qu'est-ce que je disais dans mon commentaire... les obèses on ne les harcèle pas contrairement aux fumeurs. Pour avoir vécu le harcèlement contre les fumeurs quand j'étais aux US, je me dis que c'est de plus en plus vers ce genre de société qu'on se dirige, et ça m'effraie.

Citation :

Mais les nuages de fumée, c'est comme les nuages nucléaires, ça respecte les frontières, hein...

(toi aussi, fais une erreur de manip et perds ton super message, bordeeeeeeeeeel)

Je disais : C'est clair que ça m'énerve les gens qui viennent me saouler "haaaaan, c'est pas bieeeeeeeen!" dès que j'allume une clope. Ah ben merci de me prévenir, je suis pas au courant, dis donc. Non mais ils croient vraiment que je suis pas consciente de ce que je fais? C'est mon vice, et alors? Quand je fume, je fais attention à ne pas envoyer ma fumée sur les non fumeurs dans la mesure du possible mais franchement, qu'est-ce que ça peut leur faire? A ce tarif là, moi, je vais sauter sur tous les gens qui s'apprêtent à traverser la rue pour les prévenir des dangers qu'ils prennent parce qu'ils pourraient se faire écraser.

L'autre jour, je lisais le blog d'une fille, je sais plus laquelle, qui disait en substance "cette année, je prends pas de résolutions parce que j'en ai marre de me priver de tout, faut vivre un peu bordel!". Oui parce que si on veut une vie parfaitement saine, ciao alcool, tabac, nourriture grasse et potentiellement dangereuse (donc tout, quoi), la technologie (les ondes, les ondes), le sexe (et les MST parce que les présos, c'est pas sûr à 100%)... Bref, comme dirait la blague "docteur, docteur, je fume pas, je bois pas, je baise pas, je mange équilibré, est-ce que je vais vivre vieux?
- Vieux, je sais pas mais c'est sûr que ça va vous paraître long!"

Quand on me demande pourquoi j'arrête pas parce que "c'est bête, tu fumes pas du tout", je n'ai qu'une réponse, la meilleure : "parce que j'en ai pas envie".